Un bastringue ne meurt jamais.

Il ne restait du Bastringage qu’un amas de ruines et de tombes lorsque les troupes de l’alliance regagnèrent leurs royaumes… On avait rasé, pillé les richesses des pirates, et sur le campement seul les hurlements glauques des charognards rompaient le silence de mort qui régnait alors.

Bien dix lunes passèrent sans âmes qui vivent, mais le sommeil létal des macchabs ne tarderait désormais plus à se dissoudre dans un torrent de haine… Cela avait déjà commencé…


Sâânne avait fini par percer la couche de terre qui recouvrait son tombeau, peu rassasié par le sang d’insecte nécrophage, mais ayant tout juste assez de force pour s’extirper de son trou. Il se redressa sous la lueur bienveillante de l’astre nuit, et défia les coyotes de sa carrure putréfiée et rachitique, humant l’air nauséabond qui cernait les alentours et qui trahissait l’intense décomposition des autres membres de l’équipage.

Le Bastringage avait failli, songea le vampire qui retrouvait peu à peu la maîtrise de ses os et articulation. Il se déplaçait à pas appesantis sur le sable encore tiède des écrasantes chaleurs diurnes, scrutant le paysage méphitique qui s’étendait devant lui.


Le Bastringage avait failli, mais l’arbre avait rappelé son âme et lui avait rendu la possession de son corps. Le shaman ne savait pas vraiment la raison de son retour si prompt, mais il ressentait une incitation licencieuse, le poussant à rendre à son tour la vie et aux défunts forbans qui gisaient un peu partout dans la steppe.

Que lui importait le destin de cette racaille, si ce n’est cette chose qui semblait s’être réveillée et que l’arbre épandait au travers de la terre par des racines corrompues et qui lui dictait son rôle si insignifiant soit-il ?

Il trouvait en fait dans ce commandement un intérêt particulier qui servirait ses propres dessins, et tandis que ses incantations s’élevaient entre le monde des morts et celui des vivants, il recherchait l’âme de celle qui méritait la dépense de son mana si précieux…



RE: Un bastringue ne meurt jamais.

Saanne
Sâânne avait recouvert son corps putride d’une ample mante écarlate, dénichée dans les décombres de ce qui furent ses quartiers. Le réveil des morts était désormais éminent, et le vampire ne souhait guère se trouver dans le Bastringage lorsque ses pairs en putréfaction sortiront de leurs tombes, que l’arbre le souhaite ou non, il ne suivrait pas leur marche pour l’instant et se désintéressait de l’appel qui se faisait maintenant plus intense.


Seul un corps qu’il avait retiré de sa fosse lui importait, il l’avait enveloppé d’un linceul et traîné plus loin dans le campement. Deux chevaux rôdait non loin du lieu de carnage et attendaient en vain leurs défunts propriétaires, il fut aisé pour shaman de les domestiquer à son compte par quelques envoûtements.

Il les sella et après avoir chargé le corps sur l’un d’eux, s’apprêta à quitter la plage. La lune avait accompli la moitié de son périple, s’éclipsant à son apogée sous un obscur et épais nuage qui recouvrirait bientôt l’ensemble de la voûte céleste.

Les maigres rayons qui filtraient encore le voile sombre, guidaient le vampire qui s’éloignait du campement au galop