Résurrection ratée ou Le bug du tour 2000

"Bravo vous êtes notre 2000ème arrivant!!" Un parterre d'or et de tafta rouge se matérialisait sous chaque pas de l'esprit de Juune. "Vous êtes vraiment un chanceux, une de ces rares personnes au destin exceptionnelle!!"
La lumière était forte et les fantômes cliganient des yeux comme des paparazzis appuieraient sur leur gachette.
"Vous allez faire la couverture de Mont Dréel Magazine!! Quel chance vous avez, mon brave monsieur!"

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La brise froide soufflait entre les jambes écartées d'un squelette qui faisait mine de pisser contre un arbre mort.

"On s'gèle le sacrum par ici!" cracha-t-il.

**Je vais remettre mes gants de peau vivante et continuer les fouilles. Ils m'ont pourtant dit que ce serait par là ces satanés esprits sans enveloppes charnelles. La connaissance d'un fantôme sur son passé et celui d'autres OU le retour sous forme squelettique. Ils ont cru que j'allais me faire chier avec eux, j'ai des trésors à trouver moi!!Ils m'ont même parlé de Calypso, la Pocalypso, l'apocalypse...enfin un truc du style!**

Le tas d'os resserra le short déchiré qui lui faisait office de bas, et accrocha la cordelette à sa colonne vertébrale avec un peu de maladresse encore.

**Quelques meurtres pour retrouver forme humaine, chair et organes vitaux, mais quelques meurtres qui attireront l'attention des racines de l'Arbre de la Corruption. Elles puiseront mon flux comme un arbre boirait l'eau de la terre blème de ce désert, changeant ma volonté en une toute autre... Le risque est à courir, huh!**

Le squelette fit volte-face et son visage maintenant visible laissait apparaître des rangées de clous, comme si un acupuncteur maniaque avait tracé des lignes de métal sur la totalité du crâne qui décrocha sa machoire pour mimer le crachat de fumée, avant de lancer une roulée imaginaire sur le sol et d'avancer le pied pour l'écraser!

**Faut que j'arrête de faire ces geste par habitude, je ne sais pas d'où ça vient et c'est assez dérangeant. Quelques signes étranges perdureront m'avaient-ils dit... On va m'prendre pour un fou ouais!**

Entre l'humérus et le cubitus de chaque bras, les entités du Mont Dréel avaient placé les flèches meurtrières qui avaient eu raison de Juune. Ce qui ne lui fut pas dit, c'est qu'El Juvente avait soufflé son vent de fraîcheur faisant oublier son passé au squelette. Les flèches, elles, furent trempées brièvement dans la sève de l'Arbre pour donner au squelette une nouvelle panoplie de sentiments, neufs et non usités.

**Me faudrait une longue veste pour ne plus me geler le col du fémur!!** édité au tour 2003 par Juune

RE: Résurrection ratée ou Le bug du tour 2000

Juune
Dans les limbes du Mont Dréel, plus de Juune en vue. L'effervescence s'était dissipée, l'agotation retombée.

Des esprits venaient de colmater un trou de brume dans l'épais nuage que représente la salle d'attente du Mont Dréel, mais aucun indice ne laissait présager que l esprit de Juune s était vu proposer, en bon 2000ème âme qu'il était, une telle proposition et un tel pouvoir.

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Non loin de la flaque imaginaire d'urine encore chaude que le squelette venait d'expulser, sa main sortit du sable un bandeau rouge que l'energumen s'empressa de porter au front, l'air ravi. Auréolé de la sorte, il annonçait sa volonté de retrouver forme charnelle à qui voulait l'entendre et ses déplacements rapides le firent rencontrer violemment une pierre, puis un buisson et enfin une petite marre d'eau dans laquelle le squelette pouvait s'imaginer.

Sur la pierre, il laissa un fragment d'os. Sur le buisson, il déchira un bout de son short. Et l'eau lui renvoyait son reflet qu'il ne pouvait pas voir autrement mieux qu'en l'idéalisant.

Il sentait d'instinct les choses environnantes et c'est sans grande peine qu'il trouva un arbre sur lequel il grimpa pour trouver refuge et repos, afin de réfléchir à sa condition, tout en évitant que n'importe quel charognard ne vienne chercher sur le tas d'os quelques bouts de chairs oubliés par le précédent.

Son absence de mémoire, le besoin d'oter la vie, et sa volonté de retrouver son passé le firent tourner de la cavité occulaire -vide! - et il sombra dans un sorte de comat déjanté dont les spasmes faisaient s'entrechoquer les os dans une oraison funèbre dédiée à la lune, la pierre, le buisson et la marre. édité au tour 2003 par Juune

RE: Résurrection ratée ou Le bug du tour 2000

Juune
Des serpents s'entrelassaient, des scolopendres géants mouvaient leurs centaines de pattes dans une danse lugubre et douteuse à laquelle se mêlait des ronces et des racines vêlues d'épines accérées. Une musique lancinante, perpétuelle mais tribale caressait les environs de la scène. Le flux putride desserrait lentement son étreinte pour laisser apparaître un écrin dont la seule ambition est de répandre son envie de mal. L'écrin ne garde qu'une goutte de sève, mais le sentiment de corruption qui l'anime pourrait la rendre raz-de-marée. C'est en cela que le squelette a son rôle, c'est pour cela que la proposition lui fut destinée.

Le tas d'os s'extirpa de ses élucubrations internes par la claque sourde que la dune lui mit sous l'effet de l'apesanteur : le squelette était tombé de l'arbre, sur le chien errant qui jappait pour l'en faire descendre. Surpris, les deux êtres se fixèrent, chacun à sa manière.

Le regard sensitif du squelette se figea sur une vision rapide d'une ronce jaillissant de son bras droit et engouffrant sous les épaisses couches de branches barbelées la petitesse de l'esprit seul du chien errant, implosant la couleur qui illuminait ses yeux, et terrassant la joie, le jeu dans une orgie de violence. La tribalité musicale se faisait poignante et tambourinante... primitive. Autant primitive qu'une envie première, celle qui passe outre la volonté, et guide l'âme que le parfum de faiblesse nourrit.

L'esprit du tas d'os revint à lui. Le soleil blessait ses yeux mais l'apaisement de la lumière lui permit d'observer le fruit de la scène. La flèche entre les os de son avant-bras, celle-là même qui fut trempé dans la sève de l'Arbre, s'était dressé de hallebardes de bois plongeant leurs bourgeons de mort dans la chair du canidé, qu'aucun cri ne vint délivrer du supplice pourtant bref qui lui ota la vie.

**Je vois.** pensa l'assassin.

Il avait recouvré la vue, et par la même, les yeux tandis que le chien haletait en spasmes et autres pulsions respiratoires. Lentement, le bras de l'Arbre de la Corruption se recroquevilla, rajeunit et ne plus que le bois d'une flèche qu'il était à l'origine. Le carpe, les métacarpes et les phalanges ensanglantés, la vision nouvellement acquise lui rendit son horreur, le chien venait de mourir et son corps meurtri ne donnait pas le spectacle exquis de délectation comme aurait pu le faire une orchidée sauvage. Le carnage avait ceindé le crâne de la bête en trois jusqu'au cou, les nerfs invitant le corps sans âme de l'animal errant à s'agiter encore un peu malgré la déchirure. Humide de sang, il ne faudrait guère longtemps pour que la carcasse ne soit découverte et vidée, seule une goutte de sève se balladait sensuellement dans l'inertie corporelle qui faisait face au tas d'oset d'yeux.

Maintenant debout devant l'orgie, le squelette se dirigea encore choqué plus loin de le désert... le mal aux yeux le poignant avec certitude.

L'avénement

Un humain nerveux vint à la rencontre du squelette oeillé.

"La bourse ou la vie?!" fit l'intrus avant de se rendre compte, par un coup d'oeil rapide, de l'énergumen à qui il s'adressait. "Eh Toi, là!! La bourse ou la v... ou la v... ou le c... ou la mort?" finit-il par sortir interloqué.

Le tas d'os regardait de son regard nouveau sa main rouge et il sourit en remarquant le mouvement de l'ancienne flèche entre radius et humérus se mettre en branle lentement.

**D'abord le chien... et maintenant lui... Je dois tuer pour retrouver forme humaine parait-il, mais... un innocent?!**

Le barbare - car oui il s'agissait bel et bien de cette caste du désert que l'on nommait barbare, qui se balladait souvent seul et aux proches desquels on ne ferait pas de peine car il n'en avait pas - s'approcha, crispé sur son poignard. Le même flash vicéral et serpentueux muta la vision du squelette en une danse tribale et archaïque dont les ronces malladives se déployaient comme un piège qui se referme sur le barbare...

Sa bouche le démengeait, et il remarqua bientôt la présence d'une langue et de muqueuses buccales à l'intérieur de ses mâchoires. Faisant claquer celles-ci comme pour bien identifier les organes apparus, ses globes occulaires parés d'yeux lui firent retrouver la réalité de sa vision.

L'humain pissait le sang, ses vicères ornant le sol comme la boue décore les bottes un jour de pluie. "Les bourses ou scrotum" dirent les muqueuses du tas d'os en guise de premiers mots réels. Celles du barbare étaient juchées sur un monticule d'intestin grêle et d'oesophage, et le corps inertes fleurait bon l'acidité intérieure d'une personne nerveuse et stressée.

**Sûrement son métier de détrousseur qui le rendit acide!** pensait le corps en recomposition avant de s'en aller dans la même direction que précédemment...

Déjà un tas de chair et d'os à l'allure canine le suivait à bonne distance, à un train lent mais régulier.

RE: Résurrection ratée ou Le bug du tour 2000

Le_Corruptueur
Le canidé squelettique approchait, sans réserve, inexorablement, malgré le dépassement du corps à qui le tas d'os venait d'oter la vie et son indissible faim. Sa démarche était plus prompt que celle du squelette à la main rouge qu'il rattrappa bientôt.

"Tu es brave. Tu sembles suivre coûte que coûte ton but, et j'aime cela!"

La petite équipe passa une forêt basse. Les arbres frémirent au passage du couple. Les bras du tas d'os aussi, le cou du chien encore. Loin derrière, le corps inerte du cadavre se mit à se mouvoir et bientôt debout, ses jambes le portaient pour suivre les traces du couple plus avant. Le balancier du cadavre était lent mais suivi, et à la place de son bras droit resté au sol sous l'impact de la corruption, se dressait une branche qui touchait le sable et s'enfonçait de quelques centimètres dans celui-ci. Le long bras mal articulé s'imbriquait à l'épaule de la forme humaine qui ne s'en souciait guère, toujours butée sur sa destination.

Derrière les derniers buissons, le chien qui ne errait plus changea de cap et fit pivoter sa trajectoire vers l'ouest jusqu'à un rocher un peu plus gros que de coutûme. C'est de là que sortirent deux âmes malsaines. L'un d'eux lâcha à l'autre :

"Goyo, prends le chien, je m'occupe de l'amas d'os et d'organe là bas!!"

"OK, Shinrei, dès que j'ai fini de jouer avec le gros toutou, je te rejoins!!"

Goyo lançait déjà son fouet barbelée sur le canidé qui se laissa faire. Le chien avançait tout de même sur son ennemi qui tirait de l'autre main un poignard arrondi, ouvrant sa gueule à forte odeur de pourriture. Le barbare tira sur son fouet prêt à planter sa lame dans la nuque déjà fracturée du canidé. Lui attentait simplement l'impact la gueule ouverte. A distance raisonnable de la hanche du bipède, les mâchoires se fermèrent tandis que l'épée courte du barbare s'enfonçait dans son épaule. Le mal de chien du chien fut étouffé dans la hanche de l'homme qui sentit, au-delà de la douleur première, l'immiscion d'un corps naturel mais étranger pénétrer son corps progressivement. Le regard tenace du chien nouait la scène à une mélanciolie plate, pure, immaculée. Le gros rocher d'où se cachaient les deux du guet-apens fut décoré d'une giclée de sang, tel un geyser islandais sur le sol rocheux dégarni. Les branches se recroquevillaient déjà, la sève avait jailli, et le corps mort lâcha ses armes.

Quand le canidé se retourna, il vit le deuxième barbare au sol, gisant au sein d'une marre de sang d'où fleurissaient quelques ronces timides. Le torse du tas d'os à la main rouge était empli de racines et branches sortant par son ventre vide de toute peau. Les quelques tronçons qui avaient littéralement éventré Goyo avant même de tenter une parade carressaient les fleurs nouvelles quoique petites sur les ronces rouges de sang.

Le chien reprit sa lente marche tandis que la souche naturelle à l'intérieur de la cage thoracique se réduisait en un simple coeur battant simplement, omettant sa fonction de flux sanguin, mais dotant le tas d'os d'un organe symboique de plus.

Du temps de l'action, le corps au long bras boisé qui grattait le sol avait rejoint le groupe, formant une intime procession dans laquelle le Corruptueur, puisque la sève aidait ce squelette dans sa tâche tout en le corrompant en retour, en incarné le meneur.

"Tu seras la Tenacité, errant canidé!"

Déjà les corps morts commençaient à trembler, la "vie" de la sève leur donnant mouvement.

RE: Résurrection ratée ou Le bug du tour 2000

Le_Corruptueur
Un barbare référencé sur la liste des fantômes du Mont Dréel au nom de Yoyo, puis un autre, Elfendhuil, vinrent grossir de leur cadavre mis en mouvement par la sève l'intime procession qui se transformait en groupuscule lent et disparate.

D'une diction très articulée, le tas d'os à la main rouge qui se faisait dorénavant appelé le Corruptueur qualifia de nouvelles recrues.

"Tu seras la Nervosité, homme au bras de bois!" pointant, de son atroce tête à la chair reparue mais clairsemée, le corps à la branche traînante.

Mollement, le crâne partiellement renfloué de muscles se tourna en direction des barbares qui avaient tenté l'embuscade de consors.

"La Faim et la Soif!" intima le Corruptueur.

-Flash- La flaque de sang fleurissant de ronces autour du cadavre précédent fut littéralement absorbée par la mouvence articulée du corps inerte un simple instant. Inutile de préciser pourquoi ce corps traînant les pieds bruite chacun de ses mouvements d'un son guturale d'assoiffé, lui valant son nom.

L'autre, dont les boyaux furent répandus sur la pierre après que la gerbe de sang l'en ait décoré, reprit route en suivant la procession, laissant derrière lui son tube digestif. "La Faim lui sierait bien!" en conclua l'Arbre de la Corruption qui fit mouvoir les mâchoires du Corruptueur pour en informer le groupe. -Flash-

Le groupuscule ainsi doté de deux nouveaux membres continuait son voyage. Les 5 suivants et leur leader furent tirés de leur avancée méditative par une ronce fine mais habile sortant du sol. Les deux derniers arrivés toujours sans qualificatif furent de la partie pour creuser à l'endroit de la racine houleuse. La Nervosité extirpa de la cavité ainsi creusée le sac de ce qui semblait être manifestement les restes d'un ancien barbare. L'un des deux sans nom s'appropria la charge qu'il fixa sur son dos tant et si bien qu'il lui fut rapidement donné le nom de "la Servitude". Le dernier mouvant sans nom vit se recroqueviller la ronce fine, dont il ne dépassait qu'un vulgaire bras de quelques décimètres du sol. Ce 'sans nom' suivait la procession qui avalait les dunes sans trop se poser de questions.

RE: Résurrection ratée ou Le bug du tour 2000

Le_Corruptueur
La procession avalait les dunes à une allure zombiesque, tant et si bien qu'elle finit par passer un lieux plus touffu, certains même iraient jusqu'à appeler cet endroit une oasis, mais déjà les ronces qui enveloppaient les quelques cocotiers donnaient fière allure à la scène. Dans une oasis -hormis les colorants- il y a toujours du liquide... de l'eau, une sorte de flaque porposant repos aux nomades... Nos nomades s'étonnèrent de trouver une eau somâtre et pouasseuse, là où l'habitude aurait voulu que l'on se délecte d'une eau potable à défaut d'être pure. La vase opérait, et l'étang , quoique de dimension intéressante, n'offrait aux ronces rugueuses que quelques cocotiers sur lesquels se balancer.

Le Corruptueur vociféra à l'équipe qui s'était étoffée de La Diaphanéité celui que l'on ne voyait jamais, l'ancien sans nom; mais d'autres aussi qui attendait qu'on les nomme. En effet, la troupe avait croisé quelques barbares sur la route, déterré quelques trésors -pas des plus lourds à porter, ni même des plus enrichissants, mais des trésors tout de même- et l'Arbre donnait ses directives via le Corruptueur qui remplissait son rôle à merveille.

"C'est ICI!!"

Plus loin, l'oasis vaseuse laissait place à une semi jungle du profond de laquelle s'extirpait une falaise à la cime fraîche. La procession s'y enfonça.

RE: Résurrection ratée ou Le bug du tour 2000

Le_Corruptueur
Quelques temps plus tard...

La moiteur officiait. Le spectre de pénombre flottant tuait toute envie de voir plus loin, et par extension tuait tout espoir, idée d avenir et de progrès. Le coeur noir des âmes disciplinées n avait de vie qu au contact de la mort qu elles semaient poussées par l Arbre de la Corruption. Sa sève coulait dans les veines du Despote ambitieux. Lui n avait qu un but, répandre les ronces de l Arbre par le Mal.

Les racines polymorphes dansaient, le mouvement tribal de leurs ondulations rappellait que la nature n était pas qu un concept et qu elle possèdait une vie propre.

Les plus larges branches formaient la base d une ceinture gigantesque constituant les limites externes du Royaume Corrompu au-delà duquel on voyait l Oasis du Jeu, partie euphorisée d Helldorado. Plusieurs bras d arbres étendus sur des centaines de lieues. Des racines surrélevées pour accéder aux parties supérieures de l Arbre et enfin la Falaise Chaotoritaire d où le Despote officie. Des trous dans le sol que l on ne distingue plus vraiment, comme autant de cavités où squelettes, vampires, fantomes, goules, et autres zombies grouillent comme une jarre emplie de vers où leur quotidien calme se dessine.

Une oasis, une forêt, une falaise. Voici ce qui est visible depuis le lointain.

Cette ode à la Ronce avait un nom : Helldorado!