RE: Résurrection ratée ou Le bug du tour 2000
Le_Corruptueur
Le canidé squelettique approchait, sans réserve, inexorablement, malgré le dépassement du corps à qui le tas d'os venait d'oter la vie et son indissible faim. Sa démarche était plus prompt que celle du squelette à la main rouge qu'il rattrappa bientôt.
"Tu es brave. Tu sembles suivre coûte que coûte ton but, et j'aime cela!"
La petite équipe passa une forêt basse. Les arbres frémirent au passage du couple. Les bras du tas d'os aussi, le cou du chien encore. Loin derrière, le corps inerte du cadavre se mit à se mouvoir et bientôt debout, ses jambes le portaient pour suivre les traces du couple plus avant. Le balancier du cadavre était lent mais suivi, et à la place de son bras droit resté au sol sous l'impact de la corruption, se dressait une branche qui touchait le sable et s'enfonçait de quelques centimètres dans celui-ci. Le long bras mal articulé s'imbriquait à l'épaule de la forme humaine qui ne s'en souciait guère, toujours butée sur sa destination.
Derrière les derniers buissons, le chien qui ne errait plus changea de cap et fit pivoter sa trajectoire vers l'ouest jusqu'à un rocher un peu plus gros que de coutûme. C'est de là que sortirent deux âmes malsaines. L'un d'eux lâcha à l'autre :
"Goyo, prends le chien, je m'occupe de l'amas d'os et d'organe là bas!!"
"OK, Shinrei, dès que j'ai fini de jouer avec le gros toutou, je te rejoins!!"
Goyo lançait déjà son fouet barbelée sur le canidé qui se laissa faire. Le chien avançait tout de même sur son ennemi qui tirait de l'autre main un poignard arrondi, ouvrant sa gueule à forte odeur de pourriture. Le barbare tira sur son fouet prêt à planter sa lame dans la nuque déjà fracturée du canidé. Lui attentait simplement l'impact la gueule ouverte. A distance raisonnable de la hanche du bipède, les mâchoires se fermèrent tandis que l'épée courte du barbare s'enfonçait dans son épaule. Le mal de chien du chien fut étouffé dans la hanche de l'homme qui sentit, au-delà de la douleur première, l'immiscion d'un corps naturel mais étranger pénétrer son corps progressivement. Le regard tenace du chien nouait la scène à une mélanciolie plate, pure, immaculée. Le gros rocher d'où se cachaient les deux du guet-apens fut décoré d'une giclée de sang, tel un geyser islandais sur le sol rocheux dégarni. Les branches se recroquevillaient déjà, la sève avait jailli, et le corps mort lâcha ses armes.
Quand le canidé se retourna, il vit le deuxième barbare au sol, gisant au sein d'une marre de sang d'où fleurissaient quelques ronces timides. Le torse du tas d'os à la main rouge était empli de racines et branches sortant par son ventre vide de toute peau. Les quelques tronçons qui avaient littéralement éventré Goyo avant même de tenter une parade carressaient les fleurs nouvelles quoique petites sur les ronces rouges de sang.
Le chien reprit sa lente marche tandis que la souche naturelle à l'intérieur de la cage thoracique se réduisait en un simple coeur battant simplement, omettant sa fonction de flux sanguin, mais dotant le tas d'os d'un organe symboique de plus.
Du temps de l'action, le corps au long bras boisé qui grattait le sol avait rejoint le groupe, formant une intime procession dans laquelle le Corruptueur, puisque la sève aidait ce squelette dans sa tâche tout en le corrompant en retour, en incarné le meneur.
"Tu seras la Tenacité, errant canidé!"
Déjà les corps morts commençaient à trembler, la "vie" de la sève leur donnant mouvement.