Car la Lune est voilée, ce soir...
Poussant la porte du pied, à une heure avancée de la nuit, Mélorélie apparut sur le seuil, sa peau blafarde soudain vivement éclairée, découpée dans limpénétrable obscurité dune nuit sans Lune.
Elle semble maussade, peut être de mauvaise humeur, qui sait ?
Maculée de poussière jusquaux genoux, elle a sans doute as elle fait le chemin pieds nus, au moins en partie, pourtant elle ne semble lasse que desprit.
La jeune femme na lair dattendre personne, peut être quelque chose, en tout cas pas le mâle ivrogne qui a un instant cru pouvoir laborder, rapidement découragé par un regard doré cinglant.
Il est vrai quelle ne paye pas de mine avec ses vêtements simples, poussiéreux et usés, ses cheveux noirs en bataille et ses pieds nus, et sa petite taille narrange rien à laffaire. Elle na pourtant rien dune proie et cest seule quelle sinstalle à une table, écartée autant que possible de la vulgaire agitation qui reprend les lieux peu après son arrivée silencieuse.
Enfin, un serveur ose sapprocher de la jeune drow nonchalamment posée sur une chaise, comme une lionne sur son rocher, probablement poussé par les autres.
Malgré son apparence modeste, elle lui adresse un regard vaguement dédaigneux et passe commende dun alcool fort, servi dans un grand récipient.
Un grand boc de grès fumant ne tarde pas à lui être servis, le petit personnel redoutant sans doute cette étrange créature dont ils peinent à déterminer la race mais qui leur rappelle les histoires de loups que leur mère leur contait les soirs où ils nétaient pas sages.
Mélorélie prit le récipient entre ses mains et en sentit le fumet, avant dy donner un coups de langue, à la façon dun chat qui goutte par prudence si le lait quon lui a servit est digne de lui, puis en prend une gorgée et semble enfin se détendre quelque peu.
Elle garde le boc en main, le visage tourné vers une fenêtre bien que ce qui se trouve derrière soit rendu invisible par un écran de fumé perpétuel inhérent aux tavernes et la crasse qui recouvre cette dernière.
Ce que les yeux dorés fixent dun air songeur et sans doute vaguement agacé se trouve bien plus loin, à nen pas douter.